Témoignages de dirigeants du secteur non lucratif et de l’Economie Sociale et Solidaire
Témoignage de Nathalie Scarcella, Directeur d’établissement de l’Association Les Amis de l’Atelier
In Management stratégique des professions libérales réglementées, Economica, Collection Management Socio-Economique dirigée par H. Savall, Paris, 2010, 283 p., pp. 182-183.
« Je crois que la première action du directeur a été de s’approprier la démarche, avant de mettre en place et de structurer un management intégrant les principes socio-économiques car, dans le secteur social, la dimension économique ne va pas forcément de soi. Nous avons mis en place un management de proximité avec l’instauration d’un échelon hiérarchique supplémentaire que sont les animateurs-coordinateurs. En effet, nous avions constaté un déséquilibre important dans la répartition des charges de travail sur le site, notamment concernant les chefs de service qui pouvaient avoir 20 personnes sous leur responsabilité, ce qui était ingérable. Nous avons donc créé la fonction d’animateur-coordinateur dont le rôle supplémentaire est d’être manager de proximité.
Nous avons réalisé des Plans d’Actions Prioritaires (PAP) afin d’avoir une meilleure visibilité du développement du site à court, moyen et long termes. Enfin, des mesures concrètes ont été prises pour réduire les dysfonctionnements, ce qui a permis de réallouer des ressources dans l’amélioration des conditions de travail, de l’organisation et de la qualité de la prise en charge des résidents. Les structures d’hébergement n’étaient pas informatisées au moment de la reprise, par exemple, et un an plus tard, ils ont tous un accès à Internet, ce qui représente une véritable révolution.
La démarche a également permis d’améliorer les dispositifs de communication-coordination-concertation (3C) à tous les niveaux hiérarchiques et fonctionnels. Les objectifs étaient de formaliser tous les circuits de communication et de les clarifier en fonction des besoins des usagers. Lorsque nous sommes arrivés, tout le monde parlait de tout avec n’importe qui et à n’importe quel moment, ce qui ne facilitait pas les prises de décision. Nous avons mis en place plusieurs actions :
– renforcer l’identité de chaque établissement et la cohésion des équipes ;
– identifier la place de chaque acteur dans le dispositif ;
– restaurer la ligne hiérarchique ;
– canaliser les énergies ;
– instaurer un mode de gestion du temps.
[…]
Pour conclure, nous sommes passés de quatre à six établissements en deux ans. En outre, nous sommes passés d’une situation de débordements à une action structurée, avec des missions clarifiées ou en cours de clarification, des acteurs mieux repérés dans le temps et au sein des différents lieux. Nous visons le développement de services et l’implication des acteurs grâce à des méthodes de participation à tous les projets en cours et à venir. ».
Témoignage de Sigrid Vanden Beulcke, Responsable Ressources Humaines de la Mutualité Chrétienne Hainaut Picardie (Belgique)
In La conduite du changement dans les entreprises et les organisations, Economica, Collection Management Socio-Economique dirigée par H. Savall, Paris, 2014, 230 p., pp. 129 à 131.
« Nous pratiquons le management socio-économique depuis 10 ans et cela a eu de réels impacts sur notre organisation. Nous avons réalisé plusieurs diagnostics à des périodes différentes, ce qui nous a permis de maîtriser les dysfonctionnements et d’améliorer nos performances sociales et économiques. Aujourd’hui, nous nous améliorons encore sur ce point.
Nous avons mis en place des outils, des indicateurs et des dispositifs qui sont de plus en plus intégrés dans nos pratiques, autant de moyens améliorant le pilotage des activités et des personnes. Une cellule de neuf intervenants internes a été créée, managée par un pilote qui y alloue tout son temps de travail. Huit autres cadres attribuent 20 % de leur temps de travail à leur mission d’intervenant interne. Cette cellule réalise des diagnostics, des audits, des formations et des assistances personnalisées qui permettent d’accompagner les cadres dans le processus et la démarche socio-économique. […]
Rien n’est acquis, notamment en management, il faut toujours continuer à évoluer. Pour mener cette dynamique de changement, notre direction a fait le choix de s’appuyer sur le potentiel humain à travers trois axes stratégiques :
– mobiliser les collaborateurs sur la stratégie ;
– renforcer le développement des compétences grâce à la formation ;
– relancer le dialogue professionnel, la mobilité et la flexibilité.
Il est important de donner du sens au changement et d’expliquer pourquoi il faut le stimuler. Les outils tels que le Plan d’Actions Stratégiques Internes-Externes (PASINTEX) et le Plan d’Actions Prioritaires (PAP) nous permettent de préciser les objectifs stratégiques et les actions que nous mettons en place pour atteindre nos objectifs. […] […]
Une organisation « stagnante » aura plus de difficultés à s’adapter au changement. Notre entreprise cherche à rendre les acteurs internes plus mobiles et plus flexibles. Nous y parvenons notamment en augmentant leur polyvalence, tant dans leurs compétences que dans les tâches qu’ils réalisent au quotidien. La grille de compétences est un outil qui nous aide à développer la mobilité des membres au sein d’une équipe et parfois même en transversal avec différents services. Pour mener à bien une conduite de changement, il faut habituer nos collaborateurs à être en mouvement pour éviter qu’ils s’enracinent dans un confort éphémère compte tenu de notre environnement. Cependant, lorsque nous intégrons les collaborateurs dans cette dynamique de changement, nous prenons le risque de nous confronter à de fortes résistances aux changements. Il est donc important d’accompagner les travailleurs. Pour ce faire, chaque cadre de notre organisation est formé à la conduite d’entretiens individuels. Ce sont des moments privilégiés pour mieux connaître les collaborateurs individuellement et donc, mieux comprendre les résistances au changement, trouver ensemble des solutions, répondre aux incompréhensions et encourager.
[…]
Enfin, nous avons renforcé nos indicateurs et nos tableaux de bord de pilotage de manière à améliorer notre veille sociale et à être plus proactifs. Par exemple, nous avons affiné notre indicateur sur l’absentéisme de façon à pouvoir identifier plus rapidement les zones à risque. Nous avons également construit des indicateurs qui permettent de suivre les délais de traitement et d’identifier les services en difficultés. ».
Témoignage de Patrick Tabchoury, Directeur Général de la Congrégation maronite des sœurs de Sainte-Thérèse (Liban)
In La conduite du changement dans les entreprises et les organisations, Economica, Collection Management Socio-Economique dirigée par H. Savall, Paris, 2014, 230 p., pp. 159-161.
« J’aimerais aborder les indicateurs financiers illustrant la gestion socio-économique telle qu’elle est pratiquée dans nos hôpitaux au Liban. Les hôpitaux que je représente ici appartiennent à la congrégation des sœurs Thérèse, fondé en 1935. Il s’agit d’un ensemble hospitalier composé de trois hôpitaux de courts séjours, deux hôpitaux de longs séjours, associés à d’autres installations liées aux soins. L’intervention socio-économique s’est déroulée dans les trois hôpitaux de courts séjours, Saint-Georges, Sainte-Thérèse et Saint-Louis, tous les trois accrédités. Au total, les organisations recensent un peu plus de 1 000 salariés, 400 médecins, pour environ 400 lits. […] […]
Concernant l’évolution de la CHVACV et ses effets sur huit mois, nous pouvons observer que le nombre d’heures de travail s’élève à environ 600 000 heures pour Saint-Georges, 400 000 heures pour Sainte-Thérèse, 300 000 heures pour Saint-Louis et 1 200 000 heures en consolidé. Malgré la diminution des coûts fixes due à des événements externes, l’augmentation de la CHVACV a généré une plus-value de 3,2 millions de dollars.
[…]
Nous savons tous que les dépenses principales des hôpitaux concernent les achats et les salaires. Entre 2012 et 2013, le pourcentage représentant les achats dans le chiffre d’affaires, est passé de 40 % à 36 % pour Saint-Georges, de 39 % à 33 % pour Sainte-Thérèse et 36 % à 35 % pour Saint-Louis. Après consolidation de ces données, nous constatons une baisse de 39 % à 35 % entre 2012 et 2013. La même base d’analyse pour l’évolution de la masse salariale entre 2012 et 2013, nous apprend que Saint-Georges est passé de 34 % à 32 %, de 44 % à 42 % pour Sainte-Thérèse et de 33 % à 30 % pour Saint-Louis. […] […]
Enfin, nous sommes passés de 100 000 à plus de 700 000 dollars de profit pour le premier hôpital, de 400 000 dollars de perte à 200 000 dollars de profit pour le second, et d’environ 100 000 à environ 200 000 dollars de profit pour l’hôpital Saint-Louis.
Pour conclure, je dirais simplement que l’intervention socio-économique est directement liée à l’amélioration financière des trois hôpitaux présentés ici. De manière consolidée, nous faisions environ 300 000 dollars de perte en 2012 et, en 2013, nous avons réalisé un profit de plus de 700 000 dollars. ».
Témoignage de Norbert Deville, Directeur Général du CETAF
In La conduite du changement dans les entreprises et les organisations, Economica, Collection Management Socio-Economique dirigée par H. Savall, Paris, 2014, 230 p., pp. 141-143.
« Nous pratiquons le management socio-économique depuis trois ans. Nous avons démarré la démarche en juin 2010 en participant aux formations de l’Iseor et la présentation de notre premier diagnostic a été effectuée à la fin de l’année 2010. Suite à cela, nous avons mis en place des groupes de projet pour réduire les dysfonctionnements subis et révélés par le diagnostic. Après deux ans, en novembre 2012, nous avons fait une évaluation socio-économique complète qui a révélé de nouveaux dysfonctionnements, que nous sommes en train de corriger. En parallèle, nous avons créé un groupe de pilotage et surtout une cellule d’intervenants internes. Ce dispositif permet de partager les outils du management socio-économique avec les managers tout en les accompagnants dans leur utilisation et leur appropriation.
[…]
Parmi les changements observables au sein de la structure, certains semblent importants et illustratifs de l’évolution de la structure. Par exemple, nous organisions des journées du personnel avec un ordre du jour réalisé par le patron, puis décliné en informations. Désormais, ce sont les salariés qui organisent eux-mêmes ces journées, qui ont lieu chaque semestre. Depuis lors, les ordres du jour n’ont pas à être retouchés.
[…]
La version initiale de notre PASINTEX tenait sur une page et était composée de trois axes stratégiques et de six objectifs prioritaires associés à des actions prioritaires et programmées dans le temps. Nous l’avons mis à jour chaque année, ce qui nous a permis d’évaluer des difficultés en termes de programmation des actions. Cependant, nous sommes parvenus à terminer 90 % à 95 % des actions sur la période 2011-2013 et l’évaluation socio-économique de janvier 2012 a démontré des résultats probants. En effet, nous sommes parvenus à réduire 63 % de nos dysfonctionnements. Auparavant, nous avions un rendement socio-économique de 4 % alors même que nous avions 12 000 heures de travail qui étaient perdues par des non renouvellements de départs en retraite suite à une très forte contrainte budgétaire. ».